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ROMANS

Romans et philosophie.

 

Peut-on faire de la philosophie en lisant des romans ?

 

Alain répond franchement « oui » :

 

 

 

 

Ordinairement un roman raconte une tranche de vie. La philosophie s'occupe d'une manière générale des « choses de la vie. » Donc il y a un rapport direct de contenu à contenu entre un texte de romans et un de philosophie. Ce dernier cependant a parfois des caractéristiques qui obligent à ne pas le lire à la manière d'un roman. Cela est évident.

 

L’'inverse est plus facile à justifier : tout roman comporte des dimensions philosophiques. Cela peut s'étendre au roman tout entier par le thème qui est traité, directement ou sur quelques passages et références..

 

Dans « Thérèse Desqueyroux » de Mauriac, d'héroïne sort du tribunal avec un acquittement : ainsi, on est immédiatement branché sur les problèmes philosophiques de la justice.

Il est moins évident par contre de faire un rapport entre le titre de Koestler : « le zéro et l’infini » et ce qu'on a appelé ensuite « la responsabilité historique ».

Il est donc intéressant et facile de passer par la lecture de certains romans pour accéder à une réflexion d'ordre philosophique.

 

Cela peut, de surcroît, servir d'intermède dans l'étude des informations et connaissances que tu es censé(e) assimiler en une année scolaire.

 

Dans cet esprit, une première évidence s'impose : il faut d'abord lire le roman pour lui-même, donc pour le plaisir. Les problèmes philosophiques, on verra ça après.

 

Dans un deuxième temps, comme, par exemple, pour « l'Etranger », une certaine méthode, un certain mode de lecture sont préconisés qui permettent de dégager une réflexion sur des thèmes philosophiques.

Cela veut dire, en clair, qu'il faut se contraindre à un type de lecture particulier : on abandonne pour un moment le plaisir de lire au profit de celui de réfléchir et de problématiser, comme on dit maintenant.

 

La plupart du temps, Alain et Valéry l’avaient bien noté dans les citations ci-dessous : philosopher, c’est centrer son attention sur les mots et leur signification. Dans les faits, prendre des textes d'une manière philosophique consisterait à observer en nous un certain « retentissement » vis-à-vis des mots employés. Par ce terme de retentissement, j'entends ce que les mots provoquent en nous comme réaction intellectuelle et/ou affective. Les linguistes pour désigner ce phénomène emploient les termes de dénotation et de connotation.

La dénotation renverrait au sens strict des mots tels qu'on peut le trouver par la consultation d'un dictionnaire. La connotation pourrait être définie comme une sorte de halo entourant les mots tels qu'on les a saisis dans leur(s) signification(s) par l'usage quotidien et par certains types d'apprentissage. Pour prendre un exemple simple, un mot comme « émotion » a un sens ordinaire que tout le monde entend mais lorsqu'il passe par l'analyse de spécialistes en philosophie et en psychologie il prend des extensions multiples. Il en serait de même du mot « intelligence » ou de l'expression « être intelligent ». Dans les conversations courantes, c'est simple ; tout le monde croit comprendre, ce qui explique l’abus du jugement de valeur (être ou ne pas être intelligent) à l’école. C'est vrai d'une manière très générale. Mais lorsque, en psychologie, on veut définir précisément le sens de cette fonction, les spécialistes proposent une belle variété de définitions soit sous la forme d'un texte ou d'une citation soit sous la forme d'un tableau beaucoup plus compliqué : un cube, comme celui de Guilford.

 

S'intéresser au retentissement que peut provoquer en nous tel ou tel mot est donc une bonne première approche de la réflexion philosophique. On peut vérifier cela à l'aide de quelques citations courtes.

 

« Il faut être bien savant pour saisir un fait. » Ou encore plus court : « L'enfer c'est les autres. ».

 

On perçoit tout de suite que certains termes relativement simples renvoient à des problématiques variées. Exemple : être « bien savant ». Tout le monde accepte la formule, en gros. Pour « l'enfer », c’est pareil : si on n'a pas une connaissance minimale du langage religieux ou théologique cela ne doit pas vouloir dire grand-chose pour certains mais beaucoup trop de choses pour d'autres, croyants, par exemple. Une fois défini le mot enfer il n'est pas très facile non plus d'affirmer avec Sartre que l'enfer, ce mode de traitement particulier des péchés commis, nous est imposé par ceux qui nous entourent. « Les autres », c’est vague, ça demande explicitation.

 

Ainsi, il est avancé que la lecture de romans peut engager dans la réflexion philosophique mais une condition stricte est posée d'entrée de jeu c'est de bien prendre en compte le (ou plutôt les) sens des mots.

Car ils sont au centre de réseaux de significations et même au centre de réseaux de réseaux.

D'où la technique de l'organigramme dans le recherche des idées.

 

Le parcours périodique de certains articles dans la catégorie « méthode » peut montrer la validité et l'efficacité de la double procédure recommandée ci-dessus : lecture de romans pour le plaisir puis avec une attention particulière aux mots ou plutôt au retentissement que certains termes peuvent avoir en nous. C’est flagrant pour la lecture des deux citations suivantes.

 

« Toute la force d’un penseur est terminée peut-être à savoir ce qu’il dit. »   (Alain)

 

« Chaque homme sait une quantité prodigieuse de choses qu'il ignore qu'il sait. Savoir tout ce que nous savons...Cette simple recherche épuise la philosophie. » Valéry.

 

 

 

A titre d’échantillons, voici une liste de titres qui vont dans ce sens.

Certains pourraient faire l'objet d'une lecture dès la classe de terminale « français » en ne confondant cependant pas trop littérature et philosophie. Dans ces œuvres, même si la rédaction littéraire présente une consonance philosophique, tout n'est pas traduit directement en réflexion de cet ordre.

Comme l'indique Iver, un linguiste allemand dans son ouvrage sur « l'acte de lire », il faut insister davantage sur le rôle du récepteur (lecteur) dans la production du sens (ou des sens) d'un message.

 

 

Anouilh : « Antigone »

Camus : « l’Etranger » ; « la Peste »

Gr. Greene : « le fond du problème »

Hémingway : « pour qui sonne le glas ? »

Huxley : « le meilleur des mondes » (à mettre en // avec « la République » de Platon)

Koestler : « le zéro et l’infini »

Malraux : « la condition humaine »

Mauriac : « Thérèse Desqueyroux » ; « la fin de la nuit »

Sartre : « Huis clos »



25/09/2016
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