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Conscience 2 : la psychologie expérimentale.

 

. conscience 1 :  la psychologie empirique,

. conscience 2 :  la psychologie scientifique ou expérimentale,

. conscience 3 :  les apports de Freud.

 

 

Psychologie empirique / scientifique ?

 

 

        Avant d’aborder le freudisme, quittant le domaine de la psychologie empirique, le salut viendrait-il d’un traitement scientifique de l’objet ?

 

Quittons donc la manière propre à Proust, Victor Hugo, Mauriac, Malebranche ou à l’antique confessionnal pour tenter de voir s’il n‘y aurait pas moyen de faire des études plus objectives de ces étranges animaux tapis au fond de nous ?

 

En d’autres termes, peut-on passer de la psychologie empirique à la psychologie scientifique ou expérimentale et à quel prix ?

 

Dans l'histoire parallèle de la philosophie et de la science, deux points principaux se sont dégagés en épistémologie : une nette séparation entre spéculation et expérimentation scientifique.

 

On doit à Lavoisier, au XVIIIe siècle, d'avoir nettement marqué qu'une science ne pourrait être telle qu'en se  préoccupant plus du quantitatif que du qualitatif. Des utopies des alchimistes du Moyen Âge qui voulait transmuter le plomb en or en se fondant uniquement sur les apparences pour la couleur, la malléabilité, etc. au tableau de Mendeleïev, par exemple, c'est le classement  périodique qui a prévalu.

En gros, pour qu'une science obtienne son statut officiel  des conditions impératives doivent être respectées.

 

L'objet étudié doit être strictement délimité et défini. L’exemple type est celui de la biologie : on étudie le vivant sous toutes ses formes et non pas « la vie » qui reste un sujet de spéculations métaphysiques théologiques ou littéraires.

L'objet étant clairement délimité, il faut s'appuyer sur des méthodes sérieusement fondées et validées par un consensus de savants même si ce critère n'est pas absolument décisif.

Les deux principales méthodes sont expérimentales et/ou logico-mathématiques. Les deux d'ailleurs se conjuguent dans la science contemporaine.

A la fin du XIXe siècle, il y eut une forte effervescence dans le domaine des sciences, de l'industrie et des recherches pour connaître scientifiquement tous les objets en particulier ceux qui concernaient le fonctionnement de l'homme et des sociétés après les succès de la physique et de la biologie.

La troisième condition à remplir est que les travaux scientifiques débouchent sur l'énoncé de lois crédibles, cohérentes, vérifiables s'insérant dans des théories d'ensemble plus ambitieuses mais aussi plus risquées. On se débat encore actuellement sur le caractère corpusculaire ou ondulatoire du réel. Le fonctionnement chimio-électrique et mécanique du cerveau est encore un beau domaine de recherche.

 

En ce qui concerne la conscience comme objet d'étude, on peut dresser le tableau suivant.

 

La conscience a d'abord été au centre d’approches métaphysiques, théologiques, pragmatiques et littéraires.

 

Ces phénomènes irrécusables restaient assez mystérieux pour les philosophes. La conscience ou l’âme aux mains des théologiens avec des rapports à Dieu est plus du domaine de la foi que du savoir. Ces tentatives de démystification du réel ont marqué ce qu’on appelle « le miracle grec. » Ce ne fut pas aussi radical que cela ; restaient les résidents de l’Olympe et la Pythie de Delphes mais la Raison allait finir par l’emporter et la Chouette de Minerve étendre son ombre sur le monde.

 

Progressivement, une laïcisation s’est établie que traduit le vocabulaire : âme/esprit/ conscience … Descartes en a tiré le principe de l’être ou de l'existence avec le « je pense  donc je suis. » Une première bousculade a été provoquée par Bergson qui a fait remarquer que la conscience n'était pas constituée d’états mais formait un continu dynamique c'est-à-dire des suites d'actions.

 

Avec l'arrivée du positivisme à la fin du XIXe siècle et les  succès spectaculaires de la méthode expérimentale en physique, le problème se posa de savoir comment appliquer cette exigence d'expérimentation à un objet aussi particulier que la conscience et, d'une façon plus générale, au fonctionnement  psychique.

Après la longue traversée sous l’égide de la psychologie empirique dont il ne faut pas oublier la valeur - elle sert dans la vie de tous les jours -  il fallut passer par les rudes épreuves de la méthode expérimentale pour tous les apprentissages fondamentaux qui nous font survivre. Un exemple simple : faut-il connaître les lois de la physique pour apprendre à se mettre debout et marcher ? L’empirisme et le pragmatisme ont encore de l’avenir devant eux.

 

Pour ce qui est de la conscience, comme échantillon du fonctionnement psychique, comment appliquer la méthode expérimentale puisqu'elle est le critère du statut scientifique actuel ?

 

Il était certain que l'on devait abandonner toutes les spéculations religieuses, poétiques littéraires … pour agréables qu'elles soient, au profit des exigences expérimentales.

 

Au moins au début du XXe siècle, la liste des critères étaient faciles à utiliser comme filtres.

 

  • objet bien déterminé, méthode expérimentale et/ou logico-mathématiques.
  • établissement nécessaire de lois formulées plutôt en termes mathématiques ou statistiques.
  • insertion des résultats obtenus dans une théorie validée pour sa pertinence et sa cohérence : c'est-à-dire pour sa correspondance au réel ou à une traduction scientifique admise de celui-ci avec la nécessité que ces lois entrent  dans un ensemble logique sans bavure. Le tableau de classement périodique est un exemple type puisqu’il permit de ranger « théoriquement » des éléments qui n’étaient pas encore connus. De plus en plus la science procède par emploi de modèles épistémologiques vérifiés par simulation.

 

Mais comment peut-il en être avec la conscience et le fonctionnement psychique animal et humain ? À sa naissance au début du XXe siècle, cette recherche deviendra ce qu'on appellera la psychologie expérimentale.

 

La reprise de la liste des critères ci-dessus peut être un bon test de scientificité.

 

La conscience : entité à multiples facettes comme on l'a constaté dans ses définitions au cours de l'histoire pourrait-elle devenir « objet de science » ? En d'autres termes pourrait-elle être définie comme un objet observable et quantifiable à la manière d’un phénomène physique ordinaire ?

 

Avec des chercheurs français tels que Ribot, Bourdon et Binet …l’Américain Watson, toujours pragmatiste, désigné à l'objet sous le terme « Behavior » c'est-à-dire comportement, d'où le nom de béhaviorisme pour désigner cette première forme de psychologie expérimentale.

Le schéma était clair et simple : on ne s'occupait que du comportement visible et quantifiable : ce fut le succès de la formule S/R (Stimulus/Réaction). On mettait un rat privé de relations sexuelles dans un compartiment relié à un autre où se trouvait une femelle. Mais il fallait pour la rejoindre et s'accoupler franchir une grille électrifiée provoquant une douleur assez vive. Pour mesurer l'intensité du besoin sexuel, il suffisait de compter combien de fois le mâle franchirait la grille au prix de la douleur pour rejoindre la femelle. On comparait ces résultats avec ceux de l’emploi de la même procédure mais en changeant la femelle par des aliments ou par tout autre objet correspondant à un besoin. On pouvait tirer de ces expériences des statistiques qui indiquaient la force relative du besoin ou de la tendance à étudier. Mais des objections furent vite soulevées.

D’une part, il ne s’agissait que d’animaux et d’autre part, les situations pouvaient rapidement se modifier avec ce que l'on appelle l'effet « re-test » fondé sur le conditionnement étudié par Pavlov. En gros cela revient à dire que le mâle peut progressivement évaluer le degré de douleur et donc se forcer à traverser la grille ce qui fausse les résultats.

Le critère quantité était donc respecté mais quelle signification pouvait-il avoir en termes de compréhension vraie, ici, simplement du comportement animal ?

Autres réserves faciles à émettre : en quoi cette situation très simplifiée peut correspondre à ce que l'on rencontre dans la vie réelle, dans un cadre réel avec une multitude de paramètres entrant en jeu ?

Objection plus grave encore : en quoi ces expérimentations relativement simplettes peuvent-elles rendre compte des comportements humains ? Et encore ici, on ne parle que de comportements partiels et non de conduites complexes.

Si on ajoute quelques facteurs pour se rapprocher par exemple du tableau tiré de l'étude du texte du Piaget « intelligence et adaptation », on s'aperçoit que le nombre et la variété d'expériences diverses exigées sont impressionnants.

 

Il n'est pas étonnant que le calcul du quotient intellectuel, le fameux QI. (normal = 100), par exemple, ait été autant employé et controversé depuis sa conception à usage scolaire. Par certains côtés, il ressemble beaucoup à la cage à rat de tout à l'heure : on est plus ou moins intelligent si on connaît ou ne connaît pas le nom du Président de la République, par exemple, ou si on passe ou non par d'autres items permettant de dire si on est débile léger, moyennement intelligent ou alors d'une intelligence supérieure au-delà de 120 etc.

Après cette analyse minimale des informations et réflexions qu'en est-il de notre objet d'étude intitulée la conscience ? Comme l'aurait dit Bacchus : « On n'est pas sorti de l'auberge. »

 

 

Pratiquement parlant, devant l'obligation de faire une dissertation sur le sujet, un principe de précaution s'impose qui consiste à annoncer la couleur : c'est une étude expérimentale ou à la manière de Platon, de Descartes, de Proust, ou de Benoît XVI. Les barrières étant établies, il sera plus facile de retrouver les moutons. Heureusement. Il reste la commode psychologie empirique immédiatement mobilisable même si elle n’est pas parfaite.

 

Est-ce que Freud va beaucoup nous aider ?



12/02/2013
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