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la RAISON_11

 

La raison.

 

Cette étude clôt un chapitre important dans le domaine de « l'homme et du monde » ou de « la condition humaine » pour ce qui est du programme du baccalauréat. (toujours repartir de ces cadres pour étudier un thème)

 

Les dernières parties passées en revue, c’était : en effet l'intelligence, la personnalité et à la volonté. L'importance, la complexité de leur étude était déjà visible par le nombre d'articles que l'on a dû y consacrer.

Donc, maintenant, en quoi consiste la spécificité de la raison.

 

Le balayage habituel de la fréquence d'emploi des mots dans la vie courante est toujours intéressant à exploiter. On a vu pour l'intelligence que l'expression être ou ne pas être intelligent pouvait faire déboucher sur des analyses intéressantes de son exercice.

 

Quand on évoque la notion de raison, viennent immédiatement à l'esprit des mots de la famille tels que raisonner, raisonnable … mais aussi une sorte de dérivés avec rationnel, rationalité. Cet embranchement constitue déjà une bonne indication pour le traitement du problème. Autant il est facile de lier le mot raisonnable à des actions de la vie de l'enfant, autant on sent tout de suite que rationnel et rationalité risquent de nous poser des problèmes plus sérieux.

 

Il ne faut pas oublier que nous avons déjà amorcé la pompe avec l'étude de l'intelligence. Nous ne sommes donc pas sans connaissances sur le sujet avec cependant l'obligation de distinguer comment la fonction s'exerçait et en quoi elle pourrait se différencier de la raison. L'intelligence dont on parle à l'école dans la rue est une indication fortement liée à un individu seul. On parle rarement l'intelligence collective.

Sur le plan des usages on peut noter tout de suite que la raison apparaît comme une fonction plutôt sociologique. Certes il y a une raison individuelle fortement accolée en particulier à  l'adjectif raisonnable plus souvent que rationnel. Avant 45, on définissait l’homme,  à l’école et  au catéchisme comme un « être de raison ». Après le passage d'Hitler et de Staline, ce fut un peu plus difficile à affirmer.

L'approche de la notion de raison ne semble pas facile tant les emplois de ce mot sont nombreux et parfois un peu divergents. Parmi les expressions courantes, on peut relever : avoir raison, il faut raison garder, la raison du plus fort et toujours la meilleure etc. On perçoit immédiatement les difficultés.

 

Quand on situe l'étude de ce mot dans le mouvement des idées et dans l'histoire de la philosophie, on s'aperçoit qu'il recouvre des significations très abstraites et importantes comme par exemple pour désigner le rationalisme.

 

S'il est assez simple de percevoir la signification de l'adjectif raisonnable sur le plan de la morale pour qualifier un certain type d'action, la manipulation du mot rationnel n'est pas aussi évidente au premier abord.

Certes on peut l'inclure facilement dans le compartiment de la logique. Qui dit cela sous-entend une forme de discours, l'étude du vrai et du faux, et donc une forte implication dans la communication entre les hommes.

C'est donc bien une notion appartenant à la psychologie certes mais plus à la sociologie. Dans les chapitres précédents, on a pu pressentir que l'on pouvait être intelligent sans pour autant avoir un comportement rationnel. On a vu également qu’une décision raisonnable n'entraînait pas nécessairement une action conséquente, c'est-à-dire rationnelle

Sans entrer sur un plan éthique très compliqué, par exemple, je peux décider de me soumettre à un régime et dans une suite, parfois immédiate, me laisser tenter par la dégustation de quelques friandises.

C’est seulement sur le plan scientifique que la cohérence est volontairement cherchée et maintenue sur toute la ligne. Car là s’impose la  nécessité d’établir une communication efficace dans l'échange d'informations. C’est le fondement du concept de raison.

Elle est généralement considérée comme une propriété de l'esprit humain lui permettant de se déterminer dans le choix entre  3 directions :

  • discerner le bien et le mal , (éthique)
  • mettre en œuvre des moyens en vue d'une fin donnée. (technique)

 

Les Grecs avaient appelé cette faculté le « logos »  qui se traduit par « raison » et « parole », liaison inévitable entre fonctions. Ils l’opposaient au « chaos » - en grec et en français -  pour marquer la nécessité de mettre de l’ordre dans les choses et les pensées, comme le voulaient Socrate, Platon, Aristote entre autres)

C’est en cela principalement que s’établit la nécessité de la Raison et du rationalisme.

 

 

 

Dans un extrait de « la Critique de la Raison pure » (placé en entier dans « œuvre-philo », Kant indique clairement deux types de connaissances : un fondé sur les faits et l'autre sur les principes. Il prend l'exemple de la connaissance que l'on pourrait obtenir de la philosophie de Wolf. Il affirme que cette dernière ne permet que de circuler entre les informations concernant ce philosophe mais ne fournit pas les moyens de traiter d'autres problèmes. Les philosophes appellent ces connaissances « factuelles » en opposition à d'autres qui sont « opérationnelles ». Ce que Kant  appelle des connaissances « par principes ». C'est une façon pour lui de définir la raison.

La nécessité d'une telle rigueur a donné naissance à la logique formelle souvent associée aux mathématiques dans l'expression « méthodes logico-mathématiques. »

Cela veut dire, en accord avec Kant, qu'on se préoccupe plus des « formes » de raisonnement que de leur contenu.

Cela se constate lorsque l'on veut étudier les principes de la raison qui sont aussi appelés principes de la logique.

 

Ainsi le principe d'identité

 

Il peut s'énoncer en langage courant : un objet ne peut être que lui même (dans les mêmes conditions, à cause du « devenir » possible). Cela peut se résumer sous une sorte de formule algébrique

(A est A.)

(Beau sujet de dissertation : l’adulte est-il identique au bébé qu’il a été ? Heureusement qu’il y a l’ADN. et la carte d’identité)

 

Principe de non-contradiction

Une même chose ne peut pas, en même temps et sous le même rapport, être et ne pas être dans un même sujet.

(A est différent de non A)

 

Principe du tiers exclu

« On ne peut attribuer que 2 "états" à une affirmation, un état et son contraire. Il n'existe pas de troisième état "intermédiaire". Exemple: Soit il neige, soit il ne neige pas. Et s'il neige "un peu", alors il neige. Ce principe apparaît moins évident que les trois autres. »

 

Principe de causalité

Ce principe permet de rendre intelligible le devenir, car si toute chose a une cause, alors un effet du même ordre est à attendre (succession sur l’axe du temps).

Une raison "permanente" d'un phénomène peut être ainsi trouvée, devinée, anticipée. En supposant ainsi qu'une même cause produise "toujours" le même effet, la raison dispose d'un critère de connaissance sur le plan de la découverte.

Tout effet a une cause et dans les mêmes conditions, la même cause produit les mêmes effets. Une loi peut être déterminée. (attention quand même à la boule de billard de Hume – plus loin)

 

Ainsi, la raison se présente sous deux faces :

comme un ensemble de principes directeurs de la connaissance ou de l'action ;

comme un principe de création et de mise en ordre de ces principes.

C’est ce qui justifie la distinction de Lalande entre une raison « constituante », se formant elle-même dans et par l’action ordinaire, scientifique et philosophique … pour devenir « constituée » et progresser sans cesse en s’auto-évaluant et en s’auto-générant par boucle ou plutôt par spirale avec enrichissement à chaque étage.

 

Ainsi la raison se diversifie en vue de nous permettre d’atteindre la voie de la sagesse : par conciliation, à la manière d’Alain, entre être raisonnable et être logique.

 

L'enjeu du travail de la raison reste cependant considérable pour se mettre d'accord sur la vérité.

Celle-ci fut longtemps définie comme une adéquation au réel « adéquatio rei et intellectus » par Saint-Thomas et les penseurs du Moyen âge.

 

Mais le mot « adéquation » pose problème. Est-ce que cela voudrait dire que la photographie est la réalité ou la vérité ? Magritte nous a provoqués avec un tableau représentant une pipe avec, écrit en-dessous de sa main : « Ceci n'est pas une pipe. » Voilà une première complication introduite par le principe d'identité. : À et A. Il est aussi difficile de dire A « = » A si on ne veut pas voir les matheux sursauter.

Un second aspect de la notion de vérité c'est, comme on l'a vu avec la méthode expérimentale, de reposer sur des relations de cause à effet entre les phénomènes.

Encore un beau débat qui nous attend : notamment depuis les altercations entre les « innéistes » dont Descartes et Leibniz et les « Empiristes » avec Hume, Locke et Condillac. Le problème a été posé par ces derniers à l'aide de l'exemple de « la boule de billard. » Il est clair qu'il y a un lien entre la première boule et la seconde par suite du déplacement et du choc entre les deux. Les Empiriste prétendent que la succession des deux mouvements ne constituent pas nécessairement une relation de cause à effet. Quand on y réfléchit bien effectivement, on ne sait pas trop ce qui se passe en dehors des apparences non niables. Ce qui est sûr, c’est qu’une première boule en mouvement en touche  une seconde qui se met en mouvement. C'est tout ce qu'on peut dire pour les Empiristes.

Le problème de la liaison entre cause effet n'est donc pas simple. Cela supposerait que nous connaissions très exactement ce qui a produit l'ébranlement de la deuxième boule.  Ce n'est déjà pas simple sur un plan macroscopique et si on passe sur  un plan quantique, c'est encore un autre genre de sport.

 

 Ce serait simple avec les Empiriste : une table rase et ensuite un empilement d'impressions qui se transformeraient en idées par répétition, contiguïté, associations diverses. Etc. c'est-à-dire par une « accoutumance » purement psychologique. Là, au moins on sait faire. Ce serait une définition de la vérité qui sauve les apparences et évite les problèmes mais qui ne nous apparaît maintenant pas très crédible.

 

Descartes Leibniz ne nous offrent pas mieux. Ils  se réfugient dans une argumentation facile en disant que c'est Dieu qui a mis en nous l'idée de vérité et donc  l'idée de liaison cause effet dans la nature à condition que l'on ait un temps homogène, également garanti par un Dieu qui ne peut pas se tromper, ni nous tromper. C’est plutôt du domaine de la foi.

 

La science contemporaine en fouillant l’infiniment grand et petit ne nous arrange guère : sauts quantiques fantaisistes par-ci, fuite incontrôlée des galaxies par-là, incertitudes d’Heisenberg pour saupoudrer le tout.

 

Et si on avait suivi les Stoïciens au lieu de se fier à Platon et Aristote, soutenus ensuite par St Paul et les autres. On saurait depuis longtemps que le vrai et le blanc ou le faux et le noir tout purs,  ça n’existe pas

 

On étudierait le gris et on se contenterait du probable comme font beaucoup de savants contemporains.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



07/05/2013
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