Utopîe
Utopie.
Thème philosophique possible?
Révision.
Occasion :
A la TV, débat autour du livre de Rouvillois : « Utopies et crimes du nazisme. »
Premières réactions à l’annonce du titre.
Nous avons tous de ce mot une connaissance intuitive : c’est quelque chose d’idéal, d’inaccessible, d’irréalisable.
L’utopie (mot forgé par l'écrivain anglais Thomas More, du grec οὐ-τοπος « en aucun lieu ») serait la représentation d'une réalité idéale et sans défaut. par définition donc n’existant en aucun endroit.
On ajoute d’ailleurs assez vite, comme Ferry, philosophe et ancien ministre de l’éducation nationale parlant du Paradis : « C’est trop beau pour être vrai. »
Donc l’association qui est faite par Rouvillois dans son dernier livre peut paraître surprenante : les utopies et les crimes du nazisme. Les crimes, oui ; tout le monde le sait ; mais des utopies ???
Recherches pour en constituer un thème d’étude sur Philopapy.
Référence au programme officiel : principalement la partie.
LA PRATIQUE ET LES FINS AGIR:
Le travail le droit
Les échanges la justice
La technique - l'art le devoir
La religion la volonté
La société la personne
l'Etat le bonheur
Le pouvoir la liberté
La violence
Autres références : la réalité, l’actualité.
Dès de départ, des hommes groupés avec nécessité de s’entendre sur l’organisation des relations d’échanges des produits, des armes, des outils, des femmes … avec toujours un degré d’insatisfaction dans les montages réalisés. D’où, toujours aussi bien sur le plan des pratiques mises en place que pour notre fond métaphysique « d’êtres de l’au-delà » surgit incessamment l’aspiration à autre chose.
D’où le parallélisme entre réalisme, organisations effectives et utopies.
Un rapide parcours historique en témoigne autour du livre de Rouvillois ; Utopies et crimes du nazisme ».C’est un bon point d’appui récent et massif dans ces dimensions essentiellement dialectiques.
A défaut de lire le livre tout entier, voici sa présentation.
Présentation de l'éditeur.
La thèse est audacieuse: le nazisme était un projet utopique au sens fort du terme. Elle est audacieuse parce nous avons tendance à exonérer l’utopie pour n’en conserver que la dimension émancipatrice, en minorant les dérives, les erreurs, les meurtres qu’elle a aussi produits.
À présent, mettons face à face la rhétorique nazie et les caractéristiques fondamentales de l’utopie: refaire l’homme par l’éducation, le travail et le sport; bâtir une cité réconciliée, unie et heureuse, tenter de la rendre éternelle… Point par point, Frédéric Rouvillois démontre un emboîtement presque parfait – et mortifère. La volonté nazie de refaçonner le monde avait beau être délirante, elle était strictement réglée et se voulait rationnelle. L’idéologie national-socialiste était paranoïaque, théoriquement indigente, c’est vrai, mais elle aussi promettait l’épanouissement d’un peuple élu. Sinon, comment expliquer l’engouement des Allemands pour un projet aussi monstrueux?
Envisager le nazisme sous l’angle de l’utopie permet deux choses. De souligner le parallèle avec l’autre totalitarisme du axe siècle, le communisme: il n’y a pas d’utopie innocente. De comprendre le « judéocide », massacre conçu et organisé comme la condition et l’une des finalités de cette utopie criminelle. Le premier rapprochement est admis par beaucoup. Le second est plus inédit, mais l’idée de l’utopie comme intrinsèquement porteuse de génocide s’impose à nous à la lecture de cet essai.
L’expression “peuple élu” est le bon dénominateur commun des utopies comme pour le peuple juif annoncé par ses prophètes.
Mais ici c’est l’appartenance à la race aryenne qui constitue le critère d’entrée dans la Terre promise.
Deux grandes questions vont guider ma réflexion et la recherche d’informations.
Quel est l’historique de l’idée d’utopie?
Est-elle encore en rapport avec la vie contemporaine ? Avec l’actualité sociale et politique ?
Historique de la notion d’utopie.
L’utopie est une fable écrite. Cf. « Mein Kampf » Elle est une invitation au voyage vers nulle part « u topos »
Il s’agirait d’établir un régime politique idéal qui gouvernerait parfaitement les hommes.
Peut-être faut-il distinguer utopie et projet d’organisation politique. Ce n’est pas facile, aussi bien pour la Cité idéale de Platon que pour le Reich éternel d’Hitler. L’un et l’autre se mêlent. On insiste surs les aspects motivationnels (attractifs) sans négliger les dimensions organisationnelles, difficiles ou cachées comme ce se fait en politique.
Une des caractéristiques de l’utopie est d’être la conception écrite d’un seul auteur même si nécessairement c’est sous des influences socioculturelles circonstancielles. La destination est collective. Hitler écrit, seul dans la cellule de sa prison mais dans le but de la construction collective du Reich.
Le but ultime est toujours la recherche de la perfection et du bonheur même si on sait que c’est inatteignable.
Les points d’appui pour la réalisation sont des facteurs individuels et/ou des leviers matériels et sociaux.
La forme est souvent celle de la Fable comme chez La Fontaine pour éviter la censure politique ou religieuse et pour pouvoir établir librement la nouvelle construction sociale.
Les initiateurs : l’idéalisme.
Platon est le premier grand idéaliste de la pensée occidentale. On peut rapprocher les deux mots-clés de sa philosophie : « l’Idée » et l’utopie. Sa pensée est exposée dans l’ouvrage La République ; Politeia, c’est-à-dire État, Constitution, la Callipolis*. Ce sont les grandes lignes de ce que devait être une cité organisée de manière idéale par castes. C’est cette volonté de constituer une cité idéale, qui fait de Platon le grand inspirateur du concept d'idée, qui fut reprise ultérieurement par les utopistes du XIXe siècle (notamment Fourier, Saint-Simon, et Étienne Cabet.)
En grec « callos » signifie beau et bien, valeurs souvent assemblées à cette époque. Donc, ici, belle et bonne Cité.
Même si Platon a réfléchi aux questions économiques, sa pensée ne fut pas aussi aboutie sur ce thème que celle de l'école de son successeur, Aristote, auquel on attribue un ouvrage consacré à l'économie : Économiques.
Les continuateurs.
Thomas More, 1527, passe pour être l’inventeur du mot, titre de son ouvrage : “utopia”
Exceptionnellement, il emploie le terme « Eutopia » qui signifierait « le lieu du Bon ».
Le terme utopia est un néologisme grec forgé par Thomas More en 1516 pour désigner la société idéale qu'il décrit dans son œuvre (en latin) Utopia. Il est traduit en français par « utopie ».
Ce terme est composé de la préposition négative grecque « u » et du mot « topos » qui signifie « lieu ». Le sens d'« utopie » est donc, approximativement, « sans lieu », « qui ne se trouve nulle part ». En tout cas la notion de lieu est présente pour indiquer une démarcation par rapport au réel, un dépaysement soit réel, soit figuré.
Par exemple : harmonie (l'abbaye de Thélème dans Gargantua de Rabelais en 1534), La Cité du Soleil de Tommaso Campanella, La Nouvelle Atlantide de Francis Bacon, Les Aventures de Télémaque de Fénelon, 1699, l'Eldorado dans Candide), (L'Île des esclaves, Marivaux, 1725), Les voyages de Gulliver (1721) de Jonathan Swift.
« Le meilleur de mondes » de Huxley est un essai plus récent pour trouver une solution à un double problème récurrent : comment mettre le système en application et que faire des résidus de l’organisation antérieure ? Seul Hitler avait envisagé la « solution finale ».
Dans la mise en place du « meilleur des mondes », on recourt au conditionnement pavlovien.
Si par de nombreuses répétitions on laisse des bébés s’approcher d’une rangée de roses (vue, odeur et toucher, donc plaisir) en les faisant passer sur un grille électrique (choc, douleur), ils auront appris l’association roses-douleur et seront adaptés à un monde analogue construit pour des raisons politiques déterminées. Interdiction de la recherche du plaisir par provocation d’une douleur liée à l’objet du désir.
L’instinct de base reste mais il peut être réorienté selon les besoins de la société dirigeante. C’est ce que promettent la gauche, la droite et le FN à chaque élection. Travailler plus pour gagner plus, par exemple. C’est exactement l’application du schéma pavlovien jouant sur la valeur « plus », transformant la pénibilité du travail en attrait. C’est l’éternel mirage de la vessie et de la lanterne.
Reste cependant le traitement des « résidus » : que fait-on des perdants transformés en opposants.
Avec Huxley, on peut perfectionner la méthode en conditionnant des bébés-éprouvettes, dès la fécondation et pour toujours, selon les fonctions qu’ils auront à remplir : manœuvres ou dirigeants.
En attendant que le système se mette en place, on éloigne les récalcitrants dans des camps (formule connue) et on calme les autres à coup de pilules contre l’angoisse jusqu’à l’extinction des « résidus ».
Ainsi le double problème est résolu. Mais en attendant, on n’évite pas les opposants comme dans tout régime.
La tâche n’est pas simple : c’est un peu comme si on voulait déraciner chez eux tout désir et toute aspiration métaphysique.
Mais appuyés sur d’autres technologies des contre-projets peuvent débarquer victorieusement sur des plages ensanglantées.
Pour le détail de certaines positions anciennes ou contemporaines, consulter les renvois sur Internet à partir du mot « utopie »
Le schéma suivant pourrait montrer des analogies entre utopie et désir.
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